
Droits des détenus : la Russie condamnée pour la vidéosurveillance permanente des détenus dans leurs cellules
► Le cadre légal russe relatif à la vidéosurveillance des détenus dans leurs cellules est insuffisamment clair, précis et détaillé pour offrir une protection appropriée contre l’ingérence arbitraire des pouvoirs publics ; il en résulte une violation du droit au respect de la vie privée et à un recours effectif.
Ainsi statue la Cour européenne des droits de l’Homme dans un arrêt de chambre rendu le 2 juillet 2019 (CEDH, 2 juillet 2019, Req. 27057/06, G. c/ Russie, disponible uniquement en anglais).
Les faits de l’espèce concernaient la mise sous surveillance vidéo permanente de détenus dans leurs cellules au moyen de caméras de télévision en circuit fermé. Les détenus requérants avaient saisi le tribunal de district pour se plaindre de cette surveillance continue de leurs cellules par des gardiennes de prison, estimant humiliant et contraire à leurs droits le fait de devoir, notamment, se déshabiller sous leurs yeux. Le tribunal les avait déboutés. La cour régionale a confirmé en appel le jugement entrepris.
La CEDH a été saisie de l’affaire.
S’agissant du droit au respect de la vie privée, la Cour conclut, après examen des dispositions législatives, que les dispositions énonçaient une règle générale qui permettait aux administrations des centres de détention et des maisons d’arrêt de recourir à la vidéosurveillance, tandis que les textes réglementaires ne faisaient que reprendre ces dispositions sans les préciser. En particulier, il n’était pas indiqué par exemple si les parties communes comme les parties résidentielles devaient faire l’objet d’une surveillance ; à quelle heure de la journée la surveillance était censée être opérée ; quelles en étaient les conditions et la durée ; quelles étaient les procédures applicables, etc. Si la Cour reconnaît que les mesures en question avaient une base en droit national, elle n’est pas convaincue que le cadre légal national existant fût compatible avec l’exigence de «qualité de la loi».
S’agissant du droit à un recours effectif, combiné avec l’article 8 de la CESDH (Numéro Lexbase : L4798AQR), la Cour retient que le droit interne ne présuppose aucune mise en balance ni ne permet aux détenus d’obtenir l’examen par le juge de la proportionnalité de leur mise sous vidéosurveillance à l’aune du respect de leur vie privée.
June Perot